Category: insight
2 minute(s) de lecture | août 19, 2024

L’importance de l’énergie nucléaire pour un avenir sobre en carbone

L’importance de l’énergie nucléaire pour un avenir sobre en carbone

Résumé :

À la fin de juin, nous avons éliminé notre filtre d’exclusion sur l’énergie nucléaire. Contrairement aux autres exclusions que nous avons supprimées, cette décision découle d’un changement dans notre façon de penser à l’enjeu sous-jacent lui-même.

Points saillants

À la fin du mois de juin, NEI a supprimé son filtre d’exclusion sur l’énergie nucléaire, une exclusion qui faisait partie de son programme d’investissement responsable depuis la création de la société précédente il y a près de 40 ans. Contrairement à d’autres exclusions que nous avons supprimées parce qu’elles sont mieux traitées par notre processus d’évaluation, cette décision est unique, car elle découle d’un changement dans notre façon de penser à l’enjeu sous-jacent lui-même. Nous sommes maintenant d’avis que l’énergie nucléaire jouera un rôle crucial dans la quête d’un avenir carboneutre et, par conséquent, les sociétés de ce secteur joueront un rôle dans notre portefeuille1.

 

L’urgence et les occasions liées à une transition énergétique réussie augmentent chaque jour. La transition comportera de nombreux aspects différents, mais la majorité des analystes s’entendent pour dire que la transformation de notre réseau électrique en un réseau carboneutre, tout en électrifiant le plus possible nos besoins énergétiques, est fondamentale. Cela signifie une augmentation massive de la demande d’électricité et une importance encore plus grande accordée à la fiabilité du réseau pour faire face à cette augmentation.

 

Selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), l’énergie nucléaire est la deuxième plus importante source d’électricité à faibles émissions de carbone dans le monde aujourd’hui, derrière l’hydroélectricité, et plus importante que les énergies éolienne et solaire combinées2. Au cours des 50 années écoulées entre 1971 et 2018, l’AIE estime que le parc mondial de réacteurs nucléaires a évité 55 gigatonnes d’émissions de gaz à effet de serre (GES), soit l’équivalent de deux années d’émissions liées à l’énergie pour l’ensemble de la planète. La Commission européenne, par l’intermédiaire de son comité mixte de recherche, a effectué un examen approfondi de la nature sobre en carbone de l’énergie nucléaire et a confirmé que ses émissions étaient aussi faibles que celles des technologies renouvelables actuelles, ou inférieures à celles-ci, une constatation qui est corrélée avec celle du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, l’Organisation de coopération et de développement économiques et la Commission économique des Nations Unies pour l’Europe3. L’énergie nucléaire représente actuellement environ 15 % de la production d’électricité au Canada et environ 20 % du réseau américain4.

 

Ce sont de gros chiffres en soi, mais c’est la fonctionnalité de l’énergie nucléaire qui rend la transition si importante. Le rôle relatif de l’énergie nucléaire pour répondre à la hausse de la demande énergétique diminuera à l’avenir, à mesure que la croissance des énergies renouvelables moins chères (et des technologies de stockage connexes) augmentera, lesquelles devraient surpasser toutes les formes d’énergie dans le futur5. Toutefois, la capacité de l’énergie nucléaire à fournir une production de base stable est absolument essentielle pour ouvrir la voie à une hausse rapide des sources d’énergie renouvelable intermittentes. En termes simples, un réacteur nucléaire peut fonctionner 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, contrairement à l’énergie éolienne et solaire. Cela contribue à la stabilité du réseau et constituera une qualité très appréciée dans le futur réseau.

 

Les événements très médiatisés ont cristallisé les préoccupations à l’égard de la fiabilité du réseau et l’ont portée au premier plan de la conscience publique. Les pannes d’électricité au Texas durant la tempête de verglas de 2021 et la menace plus récente de pannes d’électricité en Alberta nous ont rappelé à quel point nous comptons sur un réseau stable. Les exploitants de réseaux accorderont de plus en plus d’importance à la fiabilité, surtout lorsqu’ils apprendront à naviguer avec beaucoup plus de sources d’énergie renouvelable intermittentes.

 

Les seules autres sources d’énergie qui peuvent répondre à cette fonctionnalité aujourd’hui sont les grandes centrales hydroélectriques et les centrales à combustible fossile, c’est-à-dire le charbon et le gaz naturel. L’hydroélectricité à grande échelle demeurera l’épine dorsale du réseau à faibles émissions de carbone pour de nombreuses régions, mais son évolutivité est limitée par un certain nombre de facteurs, comme la disponibilité de l’eau et les répercussions de la création de réservoirs. L’utilité des sources d’énergie alimentées aux combustibles fossiles signifie qu’elles auront probablement un rôle plus important à jouer dans le futur réseau. Toutefois, pour répondre à la demande croissante d’électricité tout en atteignant nos cibles de réduction des GES, le rôle du charbon et du gaz devra diminuer considérablement. C’est là qu’entre en jeu le nucléaire.

 

Il est instructif de penser à ce qui se produirait si le monde mettait fin à la production d’énergie nucléaire existante. Il ne s’agit pas d’un exercice théorique, comme cela a été le cas au Japon, à la suite de la catastrophe de Fukushima, et en Allemagne, où la confiance du public à l’égard du nucléaire a évolué dans le même sens. Les résultats ont été révélateurs.

 

En Allemagne, l’énergie fournie par les réacteurs nucléaires qui ont été fermés6 a été largement remplacée par des sources renouvelables. Il s’agit d’une bonne nouvelle en ce qui concerne la possibilité d’accélérer le développement des énergies renouvelables sur une période relativement courte. Toutefois, ces énergies renouvelables n’ont pas remplacé la production au charbon, qui est un élément fondamental du réseau électrique allemand; ces sources ont continué de fonctionner. Compte tenu de l’augmentation prévue de la demande d’électricité7 et du besoin d’énergie de base fiable, les centrales au charbon allemandes devraient fonctionner encore quelque temps. Le résultat est un réseau qui émet presque 10 fois plus de GES que celui de la France voisine, où l’énergie nucléaire représente 63 % de la production d’électricité8.

 

Le Japon a également réussi à déployer rapidement des sources d’énergie renouvelable pour compenser la fermeture des centrales nucléaires après Fukushima. Cependant, le besoin d’une énergie de base fiable signifie que la production d’énergie fossile a bondi dans la foulée immédiate de la catastrophe, avant de revenir pratiquement au niveau observé lors de la période précédant de quelque peu l’incident.

 

Les chercheurs qui ont réalisé un scénario hypothétique, selon lequel, au lieu de fermer leurs installations nucléaires, l’Allemagne et le Japon auraient remplacé les installations existantes de production d’énergie fossile, ont découvert que les deux pays auraient réduit leurs émissions de 2 400 mégatonnes de CO2 et empêché quelque 28 000 décès causés par la pollution entre 2011 et 20179. Ce volume d’émissions équivaut à 15 fois les émissions annuelles du secteur du transport au Canada10. Nous considérons qu’il s’agit d’une importante occasion ratée qui souligne la raison d’être de l’inclusion du nucléaire dans la transition énergétique.

 

Pour de nombreuses personnes, le désastre de Tchernobyl demeure le rappel le plus frappant des risques associés à l’énergie nucléaire. Soyons clairs, les préoccupations à l’égard de la sécurité étaient valables à l’époque et le sont toujours aujourd’hui. Toutefois, un examen plus approfondi du dossier de sécurité et des répercussions sur la santé de l’énergie nucléaire donne des résultats surprenants.

 

Compte tenu des répercussions directes des accidents et des répercussions indirectes de la pollution atmosphérique, le nucléaire affiche le taux de mortalité le plus faible de presque toutes les technologies de production. Pour donner des chiffres, Our World in Data indique que l’énergie nucléaire a un taux de mortalité de 0,03 décès par térawattheure, inférieur à tous les autres types d’énergie, sauf l’énergie solaire, qui a un taux de 0,02 décès par térawattheure11. Fait important, le taux de mortalité est nettement inférieur à celui des deux principales sources d’électricité dans le réseau mondial. Le gaz naturel et le charbon enregistrent respectivement 2,8 et 24,6 décès par térawattheure, ce qui est stupéfiant. Autrement dit, l’énergie nucléaire entraîne 99,8 % moins de décès que le charbon et 97,6 % moins que le gaz. Comme mentionné plus tôt dans l’étude, d’un point de vue statistique, la décision de fermer des installations nucléaires au Japon et en Allemagne plutôt que des centrales à combustible fossile aurait entraîné non seulement une hausse des émissions de GES, mais aussi des pertes de vie beaucoup plus importantes.

 

Les déchets sont un autre facteur dont il faut tenir compte lorsque l’on examine le nucléaire. Les restes les plus toxiques du processus nucléaire conservent leur radioactivité pendant des milliers d’années, bien au-delà du calendrier de planification régulier. Seulement environ 3 % des déchets associés à l’industrie se retrouvent dans cette catégorie12, mais la toxicité et la longévité du risque en font une préoccupation importante, et le secteur a connu des difficultés à trouver une solution de stockage à long terme. Mais le stockage sécuritaire est techniquement possible, y compris le stockage souterrain en profondeur, et les innovations qui réduiraient considérablement les volumes de déchets hautement radioactifs sont prometteuses.

 

Les nouveaux réacteurs qui utiliseraient du combustible épuisé ou recycleraient leurs déchets dans le processus de production d’énergie ont connu du succès en laboratoire, mais n’ont pas encore atteint la maturité nécessaire pour devenir une solution fiable. Néanmoins, sur le plan conceptuel, il s’agit d’une voie qui éliminerait presque l’ampleur du problème actuel des déchets. Parmi les autres innovations, mentionnons la création d’un combustible qui résiste aux fusions du cœur du réacteur et la demande de petits réacteurs modulaires.

 

Nous ne sommes pas les seuls à constater que le nucléaire a un rôle important à jouer dans la transition énergétique. La Commission européenne a inclus l’énergie nucléaire dans sa taxonomie de la finance durable à titre d’activité transitoire. Cela signifie qu’elle ne peut pas encore être remplacée par des solutions de rechange sobres en carbone réalisables sur les plans technologique et économique et qu’elle jouera un rôle important dans la transition vers une économie neutre sur le plan climatique. La loi américaine sur la réduction de l’inflation contenait plusieurs dispositions visant à encourager à la fois l’exploitation continue des générateurs existants et le développement de nouvelles technologies, dans le cadre des efforts de ce projet de loi visant à stimuler la croissance des solutions climatiques. Au Canada, un crédit d’impôt à l’investissement remboursable de 15 % pour l’électricité propre a été instauré et peut être appliqué aux nouvelles installations nucléaires et à la remise en état de la production existante.

 

D’autres progrès seront réalisés dans ce secteur et certains d’entre eux offriront des occasions de placement, mais notre décision de lever notre interdiction était fermement ancrée dans le contexte actuel. Un coup d’œil sur les sociétés de services publics qui investissent massivement dans les énergies renouvelables montre que plusieurs d’entre elles possèdent déjà des capacités de production d’énergie nucléaire qui constituent l’épine dorsale de leur parc tout en cherchant des occasions en matière d’énergie renouvelable. L’élimination du nucléaire a constitué un obstacle au soutien de cette croissance et à son exploitation.

 

L’élimination de notre exclusion de longue date n’était pas une décision prise à la hâte, mais plutôt un choix logique pour un investisseur institutionnel déterminé à accélérer la transition énergétique et à atténuer les risques systémiques liés aux changements climatiques.

 

 1L’exclusion de NEI à l’égard des armes nucléaires, qui fait partie de son exclusion controversée à l’égard des armes, demeure en place.

2 Agence internationale de l’énergie, World Energy Outlook 2023.

https://finance.ec.europa.eu/system/files/2021-03/210329-jrc-report-nuclear-energy-assessment_en.pdf (en anglais).

4 https://www.cer-rec.gc.ca/fr/donnees-analyse/marches-energetiques/apercu-marches/2017/apercu-marche-canada-se-classe-sixieme-monde-pour-production-denergie-nucleaire.html.

5 Agence internationale de l’énergie. World Energy Outlook, 2023.

6 Le dernier réacteur nucléaire en exploitation en Allemagne a été fermé cette année. https://www.base.bund.de/EN/ns/nuclear-phase-out/nuclear-phase-out_node.html (en anglais).

https://www.technologyreview.com/2023/04/27/1072287/inside-germanys-power-struggle-over-nuclear-energy/ (en anglais).

8 https://www.technologyreview.com/2023/04/27/1072287/inside-germanys-power-struggle-over-nuclear-energy/ (en anglais).

9 https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0301421519303611 (en anglais).

10 Calcul fondé sur les données du gouvernement fédéral sur cette page : https://www.canada.ca/fr/environnement-changement-climatique/services/indicateurs-environnementaux/emissions-gaz-effet-serre.html.

11 Hannah Ritchie (2020) – What are the safest and cleanest sources of energy? Publié en ligne à OurWorldInData.org. Extrait de https://ourworldindata.org/safest-sources-of-energy

12 https://world-nuclear.org/information-library/nuclear-fuel-cycle/nuclear-waste/radioactive-wastes-myths-and-realities.

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